Chronique concert
GARANCE FESTIVAL
Palais Omnisports de Bercy à Paris
29/06/2002
A l'affiche de cette 11e édition du Garance festival: Capleton, Sizzla, Burning Spear, U Roy, Solo Jah Gunt, Tiken Jah Fakoly, Yaniss Odua et les Bawajafar'N Free.

Le Garance festival est longtemps resté l'unique rendez-vous d'importance des amateurs de reggae Français, l'incontournable nuit juste avant les vacances au soleil. Quand bien même Garance production ne suscite que les critiques pour ses annulations sournoises et son organisation quasi militaire, il faut en être. Peu à peu heureusement, la concurrence s'organise autour du plus gros organisateur de concerts reggae en France, et les festivals se multiplient en Europe. Allez à Bercy pour cette nuit du reggae est donc un choix...mais il est bien difficile de résister.
Surtout avec l'affiche de cette 11e édition: deux inédits avec le prophet Capleton et les enragés du ragga hip-hop, les TOK; le retour de Burning Spear après trois ans d'absence en France et celui de Sizzla, venu l'été dernier à l'Elysée Montmartre. Une bien belle affiche dont seul Beenie Man, annoncé sur les premiers flyers, devait finalement être annulé. C'était sans compter les annulations de dernière minute: la tournée européenne des TOK n'aura pas lieu et les Jamaïcains seront absents ce soir…mais ça nous l’apprendrons plus tard. Au final donc, quatre artistes Jamaïcains, deux Africains et deux Français dont un Antillais. Une belle diversité qui marque aussi la puissance de Garance: tous ces artistes ont passé des accords avec l'organisateur et lui seul produit leurs concerts français. La plupart sont donc déjà venus nous voir, à Bercy, lors de précédents festivals, ou à l'Elysée Montmartre, la salle appartenant à Garance Production.
Complet un peu moins d'une semaine avant le jour J. 17 000 personnes devaient donc se retrouver ce soir dans l'enceinte du POPB, sur la fosse, dans les gradins, les oreilles rivés sur la scène et les yeux opérant des allez retour entre la scène et les deux écrans géants. Nous avions zappé la précédente édition, après la rage suscitée par le festival 2000 et toutes ses annulations, mais n'avions pas oublié la règle de base de Garance: l'heure. De 20h00 à l'aube était-il inscrit sur les billets...à 20h00 devait commencer le show.
Tout le monde n'est pas encore dans l'immense salle de Bercy à 20h00, mais les premiers artistes sont évidemment déjà sur la scène. Les BAWAJAFAR N'FREE, vainqueurs de la sélection reggae organisée comme chaque année par Garance au début du mois de juin -cela fait au moins un bon point-, face à Linton Garvey, King Riddim et Hass Keita. Les Bawajafar ont gagné le droit d'apparaître en toute première partie du festival, et donc de se faire encore un peu mieux connaître après de multiples concerts en Ile-de-France et leur première partie de Junior Kelly en juin dernier. Un bon groupe de reggae français, nombreux pour assurer un généreux flow musical et des lyrics entre conscience culturelle et joie de vivre. Leur premier album, "Terre en Pente", a été mixé par Mad Professor. Les Bawajafar ont moins d’une demie heure pour nous en offrir des extraits que leurs fans, massés sur le devant de la scène, accueillent dans une belle humeur. Une bien sympathique ouverture du festival.
L'Ivoirien SOLO JAH GUNT, l’aîné de Tiken Jah avec ses 15 ans de carrière, apparaît sur la partie droite de la scène, à peine deux minutes après que les Français aient disparus de la partie gauche (vous n'avez pas oublié les gauche-droite de Bercy?). Les bonnes vibrations semblent au rendez-vous et le reggae roots mêlés aux rythmes d'une Afrique langoureuse entraîne la foule toujours plus nombreuse dans un mouvement généralisé. Discrète sur la scène, la petite silhouette de Solo Jah Gunt ondule aux côtés de ses musiciens, tandis que sa voix mélodieuse enchaîne les titres, majoritairement extraits de son album "Solo" come "Planète", "Samedi Soir" ou "Maman". Bercy apprécie, danse, et chante même sur "Le Soleil Sô (se lève)"...bien que ce ne soit pas encore l'heure. Après un dernier titre totalement imprégné de l'ambiance africaine, Solo Jah Gunt quitte Bercy à 21h00 et quelques minutes.
Sur la scène de gauche, d'autres musiciens entament leur set. On reconnaît tout de suite la vibe jamaïcaine, old school en plus. Des cuivres, une excellente rythmique à la basse, à la batterie et aux percussions, un petit grain de modern roots aussi...nous nous fondons tout de suite dans le rythme auquel Bercy succombe. Très belle introduction musicale avant que n'apparaissent dans un superbe costume blanc, chapeauté, The Originator, Daddy U ROY. Vifs salus, U Roy retrouve ici son public français chéri: après la sortie de ses deux derniers albums sur le label hexagonal Tabou1 ("Serious Matter" en 2000 et "Now" en 2001), U Roy est revenu en frc dans les bacs. Conquis, nous ne demandons qu'à vibrer avec lui. Et gonflé par l'enthousiasme de Bercy, U Roy offre une de ses meilleures performances. Un programme classique et attendu, avec toutes les célèbres versions du deejays: "Money Money" d'Horace Andy, "I'm Gonna Wear You To The Ball", le hit de ses débuts il y a plus de trente ans, et encore des hymnes célèbres avec "I See Jah Light", "Same Song" d'Israël Vibration (même version que sur "Serious Matter") ou "OK Fred" d'Errol Dunkley (même version que sur "Now"). Des versions archi connues mais qui ce soir ont un goût plus subtil. La fusion entre les musiciens et U Roy est parfaite, le piment moderne sied aux toasts qui coulent de la bouche de U Roy. Après un rappel et une dernière version de Bob Marley, le fameux "Soul Rebel" que le deejay réussit encore à rajeunir ce soir, Daddy U Roy nous quitte sous une véritable ovation.
Il n'est guère plus de 22h30 quand un autre groupe jamaïcain occupe la scène...de droite. La vibe est toujours reconnaissable, mais cette fois elle est décidément plus moderne. Introduction musicale avec le chant -pas très juste...- de Bongo Herman, qui lâche rapidement le micro pour retrouver ses percussions. Il en aura profité pour annoncer la venue imminente du prophet CAPLETON. Une transition osée mais très intéressante, et réussie, ce passage entre le père des deejays et l'un de ses fils -reconnu?- les plus talentueux. En tout cas, c'est le moment que nous attendions tous et la ruée sur le devant de la scène est impressionnante. Les lumières se sont éteintes et les briquets allumés dans tout Bercy pour accueillir le fireman, qui déboule en surpuissance sur les premières notes de "Jah Jah City". Totale explosion. Capleton enchaîne les titres, sans répit, et nous fondons sous l'incandescence de son verbe. Les hits passent, et à chaque fois, une immense vague de hurlement, de flammes et de bras les saluent: "Red Eyes", "Good In Her Clothes", "Smashing Up The Earth"... Capleton live est sans conteste à la hauteur de nos espérances, dans la puissance, le rythme, le verbe, la présence qu'il maîtrise et toute l'énergie qu'il diffuse. Mais, pressé ou juste professionnel? Capleton ne nous offre que 45 minutes de ce show délirant. C'est juste assez pour nous donner envie de le revoir la semaine prochaine à l'Elysée Montmartre -un bon conseil de Garance? Le prophet aura beau être réclamé par les clameurs des 17 000 personnes que comptent ce soir Bercy, il ne reviendra pas.
Car sur la scène de gauche, les DJELYS sont déjà en place et ne tardent pas à jouer. TIKEN JAH FAKOLY, grand habitué de Bercy, de Garance en général, et de la France en particulier depuis ce printemps (plus d'une centaines de dates, je crois, jusqu'à la fin de l'été) arrive dans son grand boubou ivoirien. Nous l'avons tant et tant de fois vu et entendu que nous profitons de son passage pour une petite pause, histoire de digérer Capleton. Pas très juste pour un artiste qui vient de sortir un excellent troisième album en France, "Françafrique". Nous entendons quelques extraits, à vrai dire toujours les mêmes : "On a Tout Compris", "Plus Jamais Ca"...
A 0h30, la pause officielle suit. Durant une demi-heure, Garance nous passe un vieux live de Steel Pulse à l'Elysée Montmartre... Faut pas se fouler les gars. Le MC nous annonce le programme de la deuxième partie du festival: Burning Spear, Sizzla, Yaniss Odua...mais rien sur les TOK. Comme d'habitude: aucune mention de cette absence, aucune raison donnée...et une grosse déception. Nous attendions évidemment le phénomène 2001, ceux qui ont donné un nouveau ton au dancehall en ouvrant grand la porte au hip hop pour une fusion réussie, à écouter absolument sur leur premier album "My Crew, My Dawgs". L'année prochaine en France ou ailleurs en Europe?
Gardons les déceptions pour plus tard et profitons du moment avec l'arrivée d'un des plus grands -le plus grand?- de la scène reggae depuis trois décennies, le javelot brûlant de BURNING SPEAR. Toujours aussi demandé, et encore plus depuis son Grammy award 2000 avec "Calling Rastafari", Burning Spear a récemment sorti sur le label Nocturne en France un "Live at Montreux", un album live donc, empreint de belles pointes jazzies pour cet autre festival dédié au jazz. La foule de Bercy attendait l'artiste, absent depuis trop longtemps de l'Hexagone -mais nous l'avions vu l'été dernier au Summer Jam- et lui signifie sa joie par moult bruits et mouvements. Burning Spear ne laisse pas percevoir son humeur...il entame son show avec professionnalisme, bien sûr, mais il nous semble qu'il y manque un ch'ti quelque chose pour faire passer l'enthousiasme... Et ce sont les éternels hits que Burning nous offre, avec son talent habituel, certes, car Burning ne peut pas être mauvais. "Postman" et "Marcus Garvey" sont les deux titres, joués avec de nombreuses variantes par le Burning Band, qui remportent le plus de suffrages. Fatigué par ses longues tournées américaines -et il y en a une qui s'enchaîne cet été en Europe-, Burning Spear ne s'envole pas ce soir dans ses improvisations spirituelles qui nous sont si chères. Au bout de trois quarts d'heure, il laisse la place aux autres artistes, non sans avoir récolté la juste récompense d'un public toujours aussi fervent admirateur de Burning Spear.
Surprise sur la scène de gauche, l'arrivée de TURBULENCE. Le protégé de Philip ‘Fatis’ Burrel, le boss d’Xterminator qui a produit ses deux albums ("Turbulence" en 2000 et "Rising" en 2002)…et d’autres de Sizzla- n'était pas annoncé. Son rôle est de chauffer, tout comme Bongo Herman, la salle avant que son aîné ne prenne le micro. Sa voix, à ses débuts très proche de celle de Sizzla, est aujourd'hui de plus en plus personnelle. Son hit "All We Need Is Love" sur le Cash Pot riddim lui a donné l'assurance de poursuivre dans cette voie. Turbulence nous l'offre avec deux autres titres, un sourire perpétuellement collé sur les lèvres et la joie de partager ce moment avec la foule parisienne. Sa mission parfaitement réussie, le disciple cède la place à son maître. Et voici venu, à 2h00, le tant aimé que critiqué SIZZLA. Le Bobo dread paraît très détendu ce soir. Tout en blanc, portant des lunettes mais non fumées, il débute cette prestation comme toutes les autres, en hommage au Roi des Rois, avec les premières notes de "Praise Ye Jah". Pas de soucis, Sizzla tient une grande forme ce soir. A moins que ce ne soit le passage précédent de Capleton, et la nécessaire émulation, qui donne cette pêche à cet autre terrible deejay... Sizzla enchaîne les titres, mêlant les plus récents et les plus rageurs ("Taking Over", "To The Point"...) au hits classiques plus mélodiques ("Black Women and Child", "Good Ways"...), et donne ainsi à son show un rythme et un répertoire idéal. Sizzla, après sa période tendre, et celle très brutale du début du millénaire, semble trouver un juste équilibre qui met en valeur les nuances de son talent, fait de puissance et d'accents poignants. Côté Bercy, toutes ces facettes sont également appréciées, il y a des fans en nombre impressionnant qui vibrent sur toute l'étendue de la gigantesque fosse. Les briquets s'allument, presque qu'aussi nombreux qu'avec Capleton, et Sizzla ne se prive pas lui aussi de réclamer les 'more fire' propres aux dancehall des Bobos. Après cet excellent set, Sizzla et son groupe disparaissent.
Il est 3h00, les âmes commencent à défaillir après ce coup de grâce de Sizzla. Mais les fans de YANISS ODUA ne lâche pas prise. Ils accueillent le Martiniquais avec toute la chaleur possible, et Yannis réussit à faire bouger Bercy, à l'embarquer dans un chaleureux voyage à travers un reggae marqué de rythmes antillais. A mi-chemin entre le dancehall et le roots, tant dans le verbe que la musique, Yannis Odua est l'un des récents phénomènes de la scène reggae francophone qui attire de plus en plus d'amateurs. Une reconnaissance gagnée à la force de son talent et de sa pugnacité, qui trouve ce soir toute son expression. "La Caraïbe", "Jusqu’où l’Homme Ira", "Let Me Take A Lift", "Se Poko Sa"…les riddims jamaïcains à la sauce antillaise alternent avec des titres plus à texte, pour une prestation d'ensemble tout à fait convaincante.
Le groupe sera le dernier à occuper la scène de Bercy ce matin. Il est bientôt 4h00, une heure record pour le Garance festival qui s'achève généralement après 5h00. Mais il y avait un absent de choix, les TOK, une absence que Garance n'avait visiblement pas prévue car le nom du groupe est imprimé sur les tee-shirts du festival 2002. Sans doute la plus courte édition, essentiellement marquée par Capleton, Sizzla et U Roy... Allez, c'était bon, et à ce prix (30,50 euros pour une si belle affiche), fallait pas bouder son plaisir. L'année prochaine...nous verrons.
On Reggaelution.net
13/07/2002 Yaniss Odua at the Montereau Confluences festival, Montereau-Fault-Yonne, France. review
04/07/2002 Capleton at Elysée Montmartre, Paris, France. review
28/09/2001 U Roy at Zenith, Paris, France. review
08/07/2001 Burning Spear at the Summerjam festival, Köln, Germany. review
07/07/2001 Sizzla at the Summerjam festival, Köln, Germany. review
27/04/2001 Tiken Jah Fakoly, Solo Jah Gunt at Zenith, Paris, France. review
31/03/2001 U Roy at Elysée Montmartre, Paris, France. review
U Roy interview
Reviews on the web
23/06/2002 Capleton & the David House at The Stratford Rex, London, UK. Read the review on Reggaenews.co.uk
30/03/2002 Sizzla, Turbulence at the Club Warehouse, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
16-17/02/2002 Sizzla at the Annual Bob Marley Day, Sports Arena, Long Beach and San Diego, CA/USA. Read the review from Rudegal.com
21/12/2001 U Roy at the Relive History Together Again, Amazura, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
25/10/2001 Capleton, Sizzla at the Big Fire Power, Elite Ark, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
25/08/2001 Capleton at Elite Ark, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
03/08/2001 Sizzla at the Red Stripe Reggae Sumfest Dancehall Night, Catherine Hall, Montego Bay, Jamaica. Read the review on Reggaesource.com
15/07/2001 Capleton at the Caribbean Seabreeze Festival, Long Beach, CA/USA. Read the review on Reggaesource. Read the review from Rudegal.com
06-08/07/2001 Sizzla at the Summerjam 2001, Köln, Germany. Read the review from Reggaenode.de
01/07/2001 Sizzla at the Guiness Reggae Gold Carifest 2001, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
05/05/2001 Capleton at the Rebel Salute, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
17-18/02/2001 Capleton at the Annual Bob Marley Day, Sports Arena, Long Beach and San Diego, CA/USA. Read the review from Reggaeweb.com
10/02/2001 Sizzla at Matrix concert serie, Palladium, New Rochelle, USA. Read the review from Reggaeweb.com
12/07/2000 Burning Spear at Irving Plaza, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
30/06-02/07/2000 U Roy at the Summerjam 2000, Köln, Germany. Read the review from Reggaenode.de
2000 Capleton at the Sumfest 2000, Montego Bay, Jamaica. Read the review from Rudegal.com. Read the review from Reggaeweb.com
April 2000 Capleton at Hollywood Park Casino, Los Angeles, CA/USA. Read the review from Rudegal.com
18/03/2000 Capleton at Amazura, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
January 2000 Sizzla at Hollywood Park Casino, Los Angeles, CA/USA. Read the review from Rudegal.com
02-04/07/1999 Burning Spear at the Summerjam 1999, Köln, Germany. Read the review from Reggaenode.de
1999 Capleton at the Sumfest 1999, Montego Bay, Jamaica. Read the review from Rudegal.com. Read the review from Reggaeweb.com
19/07/1998 Capleton at the Reggae Culturama, USA. Read the review from Reggaeweb.com
10/07/1998 Burning Spear at Prospect Park, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
02/11/1997 Sizzla in Beacon, NY/USA. Read the review from Reggaeweb.com
17/08/1997 Sizzla at Q Club, New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
02-04/07/1997 Burning Spear at the Summerjam 1997, Köln, Germany. Read the review from Reggaenode.de
28/02/1997 Sizzla in New York, USA. Read the review from Reggaeweb.com
30/06-02/07/1995 Burning Spear at the Summerjam 1995, Köln, Germany. Read the review from Reggaenode.de
Artists on the web
Bawajafar'N Free's web site
Capleton's web site
U Roy's web site
Burning Spear's web site
Yaniss Odua's web site
© Reggaelution.net
Bongo Herman
Capleton
Tiken Jah Fakoly
Burning Spear
Turbulence
Sizzla
Garance reggae festival 2002
© Reggaephotos.de